Notes sur la cuisine médiévale
Une ruralité dominante - Dans le Moyen-Âge européen et méditerranéen, la majorité des populations vivent hors des cités, dans des communautés rurales ou des domaines isolés ; la condition générale vise à l'autosuffisance et à l'échange commercial des surplus...
Les cités échappent à cette règle et recourent aux arrière-pays pour leur subvenir en vivres, qu'ils soient en nourriture ou combustible.
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Des cuisines embryonnaires - Les citadins et les bourgeois bénéficient rarement d'une véritable cuisine, des installations nécessaires ou des matériels pour cuisiner ; les vraies cheminées sont encore rares, on se chauffe à la romaine avec des braseros de salles ou de chambres.
Il existe malgré cela des établissements adaptés, sorte de cuisines collectives, où des cuisiniers préparent les plats avec les ingrédients apportés par les clients ; on peut également acheter des préparations chaudes sous forme d'une restauration embryonnaire ; ceci donne naissance aux auberges et autres gargotes des cités.
Les plus riches et les bourgeois recourent également à d'autres professions comme le boulanger, le chair-cuitier ou le fromager, le saucier ou l'oublieur.
Pour ceux disposant des équipements et des moyens nécessaires, ils engagent un cuisinier professionnel pour les occasions où leurs domestiques ne peuvent pas répondre aux besoins d'un repas de fête ou d'un banquet.
Les pèlerins ou les commerçants, voyageant en groupes pour leur sécurité, font souvent appel, en fonction de leurs moyens, à un cuisinier contracté pour la commission, le transport et la préparation des provisions.
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Des gargotes urbaines - Les auberges urbaines et les gargotes s'adressant au bas peuple, composés d'ouvriers, de manœuvres, de petits clercs, de la soldatesque et des pauvres, sont des lieux peu recommandés et pointés du doigt par les nobles et les bourgeois, les ecclésiastiques et les hauts clercs.
Ainsi, dans les « Contes de Canterbury » écrits entre 1380 et 1400 par Chaucer, le cuisinier Hodge de Ware est-il décrit comme produisant des nourritures louches et malsaines ; ainsi le cardinal français Jacques de Vitry (1160 – 1240) qualifie-t-il dans ses sermons la vente de chairs cuites comme un danger sanitaire et un véritable poison...
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Des cuisiniers pour les riches - Au Moyen-Âge, si on reconnait parfois les services d'un maître-queux, c'est toujours parce qu'il sait s'élever au-dessus de sa condition naturelle, en approchant un duc, un prince ou un roi, ; ou bien encore entrant au service d'un riche marchand ou d'un puissant banquier.
De fait, sauf exception, le chef de cuisine médiéval reste un homme dénigré et abaissé quelques soient ses talents, ceux-ci participant à la seule satisfaction des bas instincts et n'ayant aucune élévation spirituelle.
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Des comportements toujours présents - Ainsi, le maître-queux est-il bien souvent présenté dans les littératures médiévales comme un homme colérique et violent, souvent enclin à l'alcoolisme, défendant avec véhémence la qualité des préparations de sa cuisine jusqu'à la tromperie et la fraude.
Comme conclusion en aparté, pour celui connaissant
l'envers de certaines grandes tables d'aujourd'hui ou de beaucoup de chefs
actuels, et ceci malgré leur ripolinage permanent par les médias et les réseaux
sociaux, cette conception médiévale du chef de cuisine reste-t-elle encore bien
vivante...
Olivier-Marie Delouis
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